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La
douleur et l'infection étaient,
jadis, probablement ce qui nuisait le plus à la réputation
de la chirurgie. L'une et l'autre tuaient sans discernement les
patients qui, selon l'avis général à l'époque
manquaient de chance.
Le plus fameux chirurgien anglais du XVIIIème siècle,
John Hunter, devenait, parait-il, pâle
comme un mort avant d'opérer tant il redoutait d'infliger
à son malade des souffrances qu'il savait inéluctables.
Certains praticiens en étaient arrivés jusqu'à
considérer la douleur comme pratiquement "nécessaire"
à l'acte opératoire.
Il faut bien dire que le contexte religieux de l'Occident, du Moyen-Age
à la fin de la Renaissance, tendait à persuader les
populations que la douleur faisait partie intégrante de l'expiation
que tout homme était en devoir d'accomplir pour racheter
la faute originelle. Il suffit de voir ce que ce dolorisme à
suscité dans l'art, avec les figures des Saints Martyrs pour
en comprendre l'imprégnation chez les individus.
Pourtant,
au cours des explorations, des voyages ou des conquêtes, on
avait glané ça et là quelques remèdes
ou quelques observations sur les moyens pour atténuer ou
faire disparaître la douleur (analgésie) par la perte
des sensations ( anesthésie) lors d'une intervention chirurgicale.
Le
bâton d'opium fut de ceux là, tout comme la constatation
faite par le médecin de la Grande Armée de Napoléon,
le célèbre Larrey, qui
remarqua durant la campagne de Russie, que le froid insensibilisait
notablement le patient à opérer. Pour une grande partie,
il s'agissait en fait d'amputations.
Dès 1772, le pasteur Anglican Priestley avait découvert
un gaz qui fera une longue carrière - pas encore
achevée - en anesthésiologie le
protoxyde d'azote, plus connu dans les foires du XIXème
siècle sous le non de "gaz hilarant".
Cette dénomination étant due à la faculté
de ce gaz de faire perdre toute retenue verbale à ceux qui
l'inhalait. Cependant, tant le protoxyde d'azote que l'éther
(que l'on arriva à liquéfier dès 1801), ne
trouvèrent pas une application immédiate strictement
médical.
Encore une fois, ce fut grâce à lesprit d'entreprise
des pionniers de la médecine que l'on avança dans
la conquête de la douleur. Un dentiste
américain , Horace Wells,
qui assistait à une démonstration
du gaz hilarant dans un cirque ambulant, remarqua
l'insensibilité d'un des patient à un choc au tibia.
Dès le lendemain, il effectuait l'expérience avec
succès sur lui-même en extrayant une dent de sagesse.
Puis, arriva le fameux 16 octobre 1846,
date de la première anesthésie générale
réussie à Boston,
par Morton, un ami de Wells et qui
était également dentiste. L'opération se déroula
parfaitement tandis que le patient dormait, "assommé"
après avoir respiré de l'éther à l'aide
d'un masque.
L'année suivante on découvrait
le chloroforme que l'on utilisa pour faire accoucher
sans douleur la reine Victoria. Enfin, on ne craignait plus la douleur.
Le XXème siècle apporta sa contribution à l'anesthésie
avec les barbituriques (1932), les curares (1936) et les neuroleptiques
(1952).
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L'anesthésie
thérapeutique peut se
concevoir sous trois formes :
locale, régionale ou générale.
Elle peut être réalisée par contact, par infiltration,
par administration intraveineuse ou par inhalation.
Le but de ces anesthésies est d'éviter la douleur
durant une intervention chirurgicale avec de plus, la protection
du patient contre les perturbations physiologiques et biologiques
liées à l'agression de l'organisme que constitue l'opération.
La pharmacologie moderne permet de limiter l'intoxication due aux
produits d'anesthésies généraux en réduisant
leurs doses et en devenant plus sélectifs quant à
leurs objectifs (narcose, analgésie, neuroplégie ).
En utilisant concomitamment un produit curarisant, l'anesthésiste
obtient un relâchement musculaire total, ce qui facilite le
travaille du chirurgien.
Les
anesthésies locales
Les anesthésies locales
sont utilisées
lors d'interventions qui ne nécessitent pas l'endormissement
du patient. Elles peuvent consister en une
infiltration d'un produit directement à l'endroit que l'on
souhaite anesthésier qui agira sur un territoire cutané
dépendant d'un nerf ou de plusieurs branches de nerfs, en
bloquant le départ même des influx nerveux. De plus
en plus souvent, on exerce une anesthésie locale de contact
(pommade), 1H à 1H30 avant l'anesthésie locale principale,
afin de rendre insensible toutes injections, notamment sur le visage,
comme par exemple pour les liftings.
Les
produits les plus couramment utilisés pour les anesthésies
locales sont la marcoïne, la lidocaïne, la scandicaïne
, associées parfois à de l'adrénaline dont
les propriétés vasoconstrictrices (rétraction
des vaisseaux sanguins) limitent les saignements. Leurs durées
d'action varie d'1 à 3H.
Les
anesthésies régionales
Elles s'obtiennent en injectant
le produit d'anesthésie au contact des troncs nerveux sensitifs
qui desservent la région que l'on veut insensibiliser,
soit à la base des membres, soit à la sortie des troncs
nerveux de la moelle (dans le canal rachidien), c'est
alors une anesthésie péridurale, soit encore
directement au contact de l'origine des nerfs rachidiens (dans le
liquide céphalo-rachidien) et c'est
une anesthésie dite rachidienne.
Ces anesthésies peuvent concerner de large zones. Dans le
cas des anesthésies rachidiennes et péridurales, elles
concernent le bas du corps jusqu'au nombril environ. La motricité
est impossible, l'insensibilité totale, aucun mouvement volontaire
des membres inférieurs n'est possible.
L'anesthésie péridurale
connaît son heure de gloire à chaque accouchement normal
ou par césarienne, souhaité sans douleurs et sans
narcose. En chirurgie esthétique, cette anesthésie
s'utilise pour les liposuccions, les petits lifts abdominaux et
les liftings de la face interne des cuisses.
Les risques des anesthésies régionales
sont excessivement rares.
L'anesthésie
générale
L'anesthésie générale
par inhalation est, entre autres,
encore réalisée avec du protoxyde
d'azote (le gaz hilarant) .
On lui associe parfois d'autres drogues qui peuvent supprimer la
douleur, la tonicité musculaire ou les risques de chocs opératoires.
Depuis le chloroforme, de nouveaux produits sont apparus puis ont
disparu à chaque fois que leurs inconvénients étaient
surmontés par d'autres gaz plus sûrs. Des risques d'explosions
aux risques d'atteintes hépatiques (du foie), le progrès
continue.
Cependant,
dans la plupart des cas, l'anesthésie
générale se fait par voie intraveineuse, l'inhalation
servant plutôt à entretenir un état d'anesthésie.
Selon la procédure courante, le médecin anesthésiste
commence par endormir le patient avec des produits narcotiques (barbituriques,
voir encadré) ou hypnotiques. Il insensibilise ensuite le
corps tout entier à l'aide d'analgésiques (longtemps,
ce furent des dérivés de la morphine). L'inconvénient
de ces produits étant qu'ils ont tendance à réduire
la fonction respiratoire. On prévient ensuite le choc occasionné
par l'agression chirurgicale à l'aide de neuroleptiques qui
protègent l'organisme. Enfin, on paralyse les muscles avec
des produits curarisants , ce qui permet un relâchement général
des muscles. La rançon est que les muscles inspiratoires,
permettant la respiration ne sont pas épargnés et
par conséquence, la ventilation pulmonaire ne peut plus se
faire spontanément. Elle doit donc être maintenue à
l'aide d'un respirateur artificiel (depuis 1959) ou d'un ballon
manipulé par l'anesthésiste et toujours via une sonde
de caoutchouc, introduite soit par le nez soit par la bouche jusque
dans la trachée.
D'autres
formes d'anesthésie générale sont parfois utilisées
comme l'hypotension contrôlée ou l'hypothermie généralisée,
mais elles ne sont pas utilisées dans le cadre d'un acte
de chirurgie esthétique.
Les
produits modernes sont prévus pour avoir une vie courte dans
l'organisme. Le réveil peut ainsi se faire en quelques minutes,
l'anesthésie pouvant à tout moment être prolongée
par ré-injection. Toutefois, l'anesthésie générale
est la plus lourde des anesthésies et fait appel à
un nombre considérable de drogues. Les risques sont donc
plus conséquents que ceux d'une anesthésie locale
et les suites opératoires sont plus délicates. Le
patient doit rester hospitalisé au moins 24H pour surveiller
l'action toxique des drogues et leur complète évacuation
de l'organisme.
la
neuroleptanalgésie
Bien
que faisant partie des anesthésies générales,
la neuroleptanalgésie mérite que l'on s'y arrête
un instant. En effet, de nombreuses interventions
de chirurgie esthétique sont réalisées avec
ce type d'anesthésie (qui parle alors d'anesthésie
"vigile" obtenue par l'injection intraveineuse de sédatifs
associés à des analgésiques, qui suppriment
la douleur).
La diminution de l'anxiété et l'effet tranquillisant
dues au neuroleptique ont également une part d'effet analgésique.
Durant l'opération, le patient somnole mais reste conscient.
Il est capable de répondre à des ordres simples tout
en pouvant subir une intervention majeure. Fréquemment, la
neuroleptanalgésie s'accompagne d'une anesthésie locale
par infiltration.
Cette méthode est moins dangereuse
que l'anesthésie générale puisque l'on "drogue"
beaucoup moins le patient tout en utilisant des produits
moins toxiques.
Durant l'intervention le patient respire spontanément. Les
suites dues à l'anesthésie sont donc pratiquement
sans risque et le patient peut en général quitter
l'établissement où il s'est fait opérer dans
la journée, dans un délai minimum de 2H après
l'acte. Cette rapidité entre l'admission et la sortie d'un
patient, constitue une nouvelle forme de chirurgie aussi réglementée
et aussi sûre que toute autre chirurgie ; elle fut développée
originellement aux Etats-Unis pour des raisons à l'origine
pécuniaire et connue sous le terme de chirurgie ambulatoire.
L'anesthésiologie
est pratiquement une science neuve
qui se développe avec l'étude des mécanismes
complexes biochimiques et neurophysiologiques du corps humain. Sa
raison primordiale reste la suppression de la douleur durant un
acte opératoire, mais aujourd'hui, elle s'est aussi fixé
comme objectif la protection de l'organisme contre les réactions
du système végétatif envers cette agression.
Dans cette direction, il n'est pas vain de mentionner les recherches
faites pour stimuler les fibres nerveuses qui pourraient bloquer
le message douloureux et cela, directement au niveau cérébral,
par libération de substances naturelles aux propriétés
analgésiques, comme par exemple l'endomorphine.
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